Sunday, November 28, 2010

19 novembre 2010


Nous avions l’habitude d’être heureux, c’était avant la fin de notre monde qui s’amenuise dans l’écume, les pieds tout doucement dans l’eau froide, tandis que la plage est envahie par des chasseurs de poules grises.

Une peau respire sur un banc. Une panse se gonfle d’espérance au grès du vent, puis souffle le soupir. Elle est en charge de la surveillance du rivage. Elle est en charge de suivre le cours des choses. Elle est solide et patiente. Elle sourit depuis l’endroit où nous nous sommes quittés, sur la plage du temps qui diminue dans la mer. Quand elle aura les pieds dans l’eau froide, je l’endosserai comme un costume de noces, puis nous nagerons vers le large, sereinement.

Wednesday, November 17, 2010

Sous les éclats du cristal

Des céramiques. Non : des mosaïques. Le blondinet a une jolie mère qui fréquente les Galeries Lafayette. Le blondinet s’est heurté le tibia contre l’angle de la mosaïque jaune. On voit l’os qui a la couleur de la moelle à la fin de la cuisson du bouillon de bœuf. J’essaye de siroter à la paille une canette d’Orangina. Les plafonds sont très hauts mais la lumière nous enveloppe d’une rare clarté. On ne regarde pas à la dépense. C’est l’effet des éclats du cristal. La belle mère a des chaussures à fines lanières, une robe sombre qui tombe comme de l’eau, des cheveux fins et roux et des yeux noirs qui pétillent au dessus de sa coupe de champagne. Ça fait passer l’Orangina.

Saturday, November 13, 2010

11 novembre 2010


Des kilomètres de façades couvertes de suie à cause du flot incessant des camions fantômes qui transportent des matières premières qui n’existent plus. Il est 15 heures, le ciel commence à s’alourdir. Les bouches de lampadaires vidangent de la lumière usée. Hollywood sombre dans la terre de houille.

Un enchevêtrement de néon bleu et rouge, une station spatiale sortie de terre. Les voitures y convergent comme des essaims de mouches, ce qui laisse peu d’illusion quant à la nature profonde des choses.

L’enveloppe est dorée de mille feux. Les allées sont très larges en prévision de la congestion du trafic à venir et de l’étalement des denrées sur le pourtour du cœur creux. On y trouve des skateboards aux plateaux de résine transparente renforcés en leur milieu par une lame métallique avec des larges roues tendres et rouges. On tient le carré cartonné d’un disque 30 cm, sorti d’un mirage, juste après l’envie consécutive à une apparition post-moderne.

La technique de suggestion est employée par de nombreuses boutiques regroupées sous la même enseigne. La vendeuse serait charmante mais sa mine est pincée et ses cheveux ressemblent à une réclame pour du fromage.



Wednesday, November 10, 2010

9 novembre 2010

La réalité des champs de luzerne que nous traversons n’est pas mesurable. L’entreprise est si vaste que les voix des sirènes nous parviennent du lointain. Nous progressons entre ciel et bas-fond. Dans son rêve, William Burroughs navigue en barque sur un lac d’urine.

Nous venons de passer la ferme du Colombier. Les russes et les américains fabriquent des automobiles avec les microbes de Dieu. Un peu plus loin se trouvait peut-être l’Auberge du Bac.

L’établissement est désert. C’est un patio aux murs blanchis à la chaux éclairés par des ampoules électriques vertes. Kim Gordon est susceptible d’y apparaître d’une minute à l’autre, avec son rouge à lèvres, car il est impossible qu’elle se soit assoupie dans un clapier de bonne sœur.

Nous finissons nos whisky-coca servis dans des verres au col juste assez large pour y laisser glisser des glaçons. Puis nous regagnons notre logement communautaire, couché sur le flanc, derrière les murs d’une ville encastrée dans une autre ville.

Monday, November 08, 2010

8 novembre 2010


Perdue.

Impossible de me souvenir comment je me suis habillée ce matin. Je te regarde parce que ton visage me dit quelque chose ou qu’il ne me dit rien. Je te regarde pour me savoir.